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Neurodégénérescence moléculaire volume 18, Numéro d'article : 38 (2023) Citer cet article
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Le génotype de l'apolipoprotéine E (ApoE) ε4 est le facteur de risque le plus répandu de la maladie d'Alzheimer (MA) à apparition tardive. Bien que l'ApoE4 ne diffère de son isoforme non pathologique ApoE3 que par la mutation C112R, le mécanisme moléculaire de sa protéinopathie est inconnu.
Nous révélons ici le mécanisme moléculaire de l’agrégation d’ApoE4 en utilisant une combinaison de techniques expérimentales et informatiques, notamment la cristallographie aux rayons X, la mutagenèse dirigée, la spectrométrie de masse hydrogène-deutérium (HDX-MS), la diffusion statique de la lumière et les simulations de dynamique moléculaire. Le traitement des organoïdes cérébraux ApoE ε3/ε3 et ε4/ε4 avec le tramiprosate a été utilisé pour comparer l'effet du tramiprosate sur l'agrégation de l'ApoE4 au niveau cellulaire.
Nous avons constaté que la substitution C112R dans ApoE4 induit des changements conformationnels à longue distance (> 15 Å) conduisant à la formation d'une unité dimère en forme de V qui est géométriquement différente et plus sujette à l'agrégation que la structure ApoE3. Le tramiprosate, candidat médicament contre la MA, et son métabolite, l'acide 3-sulfopropanoïque, induisent un comportement conformationnel de type ApoE3 dans l'ApoE4 et réduisent sa propension à l'agrégation. L'analyse des organoïdes cérébraux ApoE ε4/ε4 traités avec le tramiprosate a révélé son effet sur les esters de cholestérol, les produits de stockage de l'excès de cholestérol.
Nos résultats relient la structure ApoE4 à sa propension à l’agrégation, fournissant ainsi une nouvelle cible médicamenteuse contre la neurodégénérescence et le vieillissement.
Voir des proches perdre la capacité de se remémorer leurs souvenirs est dévastateur. Or, c'est la réalité de la vie des familles d'un nombre croissant de personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer (MA) [1]. Actuellement, plus de 55 millions de personnes souffrent de démence dans le monde et près de 10 millions de nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année [2, 3]. Malgré le financement considérable consacré au développement de médicaments contre la MA [4], aucun traitement modificateur de la maladie n'existe actuellement et de nombreux essais cliniques n'ont réussi à démontrer aucun bénéfice [5, 6]. Il existe un besoin urgent d’améliorer notre compréhension des bases moléculaires de cette maladie dévastatrice et de fournir des cibles thérapeutiques validées.
La plupart des candidats médicaments dans les essais cliniques en cours ciblent deux caractéristiques pathologiques de la MA : (i) les enchevêtrements neurofibrillaires constitués de protéine tau hyperphosphorylée et (ii) les plaques amyloïdes constituées de peptides Aβ (7, 8). L’un de ces candidats pour le traitement de la MA est l’ALZ-801, un promédicament du tramiprosate [9]. Il a été rapporté que le tramiprosate administré par voie orale inhibe l'agrégation de l'Aβ-amyloïde en modulant sa flexibilité conformationnelle (10, 11). L'ALZ-801 et le tramiprosate sont métabolisés en acide 3-sulfopropanoïque (SPA), une molécule endogène du cerveau humain ayant une activité biologique similaire à celle du tramiprosate [12]. Malgré le grand potentiel du tramiprosate à modifier la progression de la MA, un effet clinique positif n’a été observé que chez les homozygotes pour l’apolipoprotéine E4 (ApoE4 ε4/ε4), un facteur de risque génétique bien établi et de longue date pour la MA [13,14, 15,16,17,18].
L'ApoE humaine est un composant protéique de 299 résidus des particules lipoprotéiques [19] et un régulateur clé de l'agrégation et de la clairance de l'Aβ [20, 21]. Les trois isoformes polymorphes de l'ApoE, à savoir ApoE2, ApoE3 et ApoE4, diffèrent par leur composition en acides aminés aux positions 112 et 158 (22). Par rapport à l’isoforme ApoE2 la moins fréquente (C112/C158), l’isoforme la plus courante ApoE3 diffère par une seule mutation (C112/R158), tandis que l’ApoE4 associée à la MA contient deux mutations (R112/R158) [23]. Récemment, il a été proposé que l'ApoE4 pourrait être une nouvelle cible médicamenteuse pour le traitement de la MA (24, 25). Diverses approches thérapeutiques ont été proposées pour réduire la toxicité de l'ApoE4 ou modifier son activité physiologique, notamment l'immunothérapie, les oligonucléotides antisens et les correcteurs de petites molécules (26,27,28,29).
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